(…) et j'aime à la fureur,
les choses où le son se mêle à la lumière. (Baudelaire)
18h15 VOYAGES EN ITALIE (Météore Films ! sortie : 29/03/2023) - Comédie
de Sophie Letourneur avec Sophie Letourneur et Philippe Katerine
France | 2022 | 1h31
Une escapade romantique peut-elle raviver la flamme dans un couple ? Elle a réussi à le convaincre de
partir quelques jours sans enfants. Ce sera où il a envie, sauf en Italie. Il y est déjà allé avec toutes ses ex… L’Espagne ? Les sentiers de l’Aubrac ? Ce sera finalement la Sicile – car selon lui, ce n’est pas tout à fait l’Italie…
ENTRETIEN AVEC SOPHIE LETOURNEUR (Extrait)
Quel a été le point de départ de Voyages en Italie ?
Au commencement, il y a eu un vrai voyage en 2016 aux mêmes endroits que dans le film et surtout avec les mêmes
enjeux… Et j’ai voulu en faire le récit. Une comédie burlesque inspirée par mon couple, qui me semblait parfois être
une caricature de lui-même, mais aussi par ceux que je croisais. En le vivant, certaines scènes ou certaines phrases
retenaient mon attention et je les notais sur des pages volantes arrachées à la fin du Guide du routard… Une fois de
retour à la maison, je demande à mon compagnon d’enregistrer avec moi au dictaphone un récit du voyage où l’on se
remémore ce que l’on avait vécu dans les moindres détails. Je suis partie de cette matière : mes notes et cet
enregistrement…
/ LIBERATION / Le « romantisme fou » du « Guide du routard »
Voyages en Italie de Sophie Letourneur semblait invoquer d’avance Roberto Rossellini dans son titre pour mieux
l’exorciser. Elle se met en scène, sans s’épargner comme toujours, dans un road trip transalpin avec Philippe
Katerine en guise de mari. Place au « romantisme fou », pas celui d’Ingrid Bergman en son temps, mais celui
promis dans le Guide du routard que consultent les personnages comme la Bible. Le film est absolument charmant
dans son côté brinquebalant, sa manière de créer l’événement à partir de pas grand-chose et absolument hilarant
dans son angoisse du vacancier qui n’a pas vécu ce que lui ont promis le catalogue ou le récit des copains. Ou
ramené, pour citer un personnage, des « madeleines de prout ». (…)
21h15 GOUTTE D’OR (Diaphana ! sortie : 01/03/2023) - Thriller
de Clément Cogitore avec Karim Leklou •
France - 2022 - 1h38
+ Avertissement : Avertissement : des scènes, des propos ou des images peuvent heurter la sensibilité des spectateurs
Ramsès tient un cabinet de voyance à la Goutte d’or à Paris. Habile et manipulateur, il a mis sur pied un
solide commerce de la consolation. L’arrivée d’enfants des rues, aussi dangereux qu’insaisissables, vient
perturber l’équilibre de son commerce et de tout le quartier. Jusqu’au jour où Ramsès va avoir une réelle
vision…
ENTRETIEN AVEC CLEMENT COGITORE
Quel est le point de départ de Goutte d’or ?
D’abord de l’envie de m’éloigner un peu des grands espaces que j’ai aimé filmés dans Ni le ciel ni la terre ou
dans Braguino et de me confronter à l’espace urbain, en bas de chez moi. J’ai longtemps habité dans les quartiers
Barbès / la Goutte d’Or. Le film est nourri de ma connaissance et de mon amour pour ce quartier, de la manière dont il
fait partie de ma vie. On a tourné de Barbès jusqu’à la plaine St Denis, sur cet axe qui passe par la Porte de la
Chapelle et où l’on observe un mouvement assez monstrueux de la ville qui chasse les classes populaires et
moyennes comme un rouleau compresseur. Avec en marge, les chantiers et les arrière-cours. Pour moi, un film
consiste avant tout à se brancher à un endroit du monde et se demander ce que l’on capte de l’énergie de ce lieu-là, à ce moment-là. En tournant, j’ai eu la sensation assez forte de raconter quelque chose de la ville qui n’appartient qu’au
présent…
/TELERAMA/ Une plongée fiévreuse dans un Paris en mutation
Tension et atmosphère semblent d’abord ancrer le film sur le terrain connu du polar social —on pense au cinéma
de Jacques Audiard, dont le complice, Thomas Bidegain, figure au générique en tant que consultant au scénario.
Exploration fiévreuse, hallucinée presque, d’un arrondissement parisien en mutation, un coin du 18 e populaire allant
de Barbès à la porte de la Chapelle, entre trottoirs bondés et colossaux chantiers d’urbanisation, misère noire des
mineurs exilés et inéluctables lendemains gentrifiés. Et un même goût pour le mystère, l’inexplicable, du
fantastique à bas bruit, tenu hors champ, qui contamine le récit de son étrangeté.(…) En accordant une vision
incroyable à Ramsès le mécréant, arroseur arrosé, Goutte d’Or le fait chavirer, et Paris avec lui. La ville se charge
d’étincelles, transformant l’arrière-boutique d’une épicerie indienne en fonderie clandestine et un chantier à l’arrêt
en tombeau à ciel ouvert. L’envoûtant ballet de bulldozers du début, sur une musique signée Couperin, rappelle
l’oxymore à l’œuvre dans Les Indes galantes, où Cogitore mariait danses nées du hip-hop et tubes baroques de
Rameau. Le réalisateur nimbe la dureté de Goutte d’Or d’une beauté onirique, tandis que l’excellent Karim Leklou,
tout en opacité, colère et cynisme rentrés, troque la tristesse mesquine de son personnage contre la possibilité d’un
émerveillement. Un rai de lumière dans les ténèbres…
18h15 RELAXE (Norte Distribution ! sortie : 05/04/2023)
de Audrey Ginestet /France - 2022 - 1h32
Cinéma du Réel 2022 – Compétition, Sélection Française – Prix Loridan-Ivens – Cnap
Écrans du Réel 2022 – Compétition Premier Doc – Mention Spéciale
« Cela fait dix ans que Manon est inculpée dans « l’affaire Tarnac », accusée avec huit autres personnes d’avoir
participé à une entreprise terroriste pour des sabotages sur des lignes TGV. À l’approche du procès, je prends ma
caméra et rejoins le groupe de femmes qui aide Manon à préparer sa défense… » Audrey Ginestet
ENTRETIEN AVEC AUDREY GINESTET (/J-M Frodon-Extrait)
Quand avez-vous décidé de consacrer un film à l’« Affaire de Tarnac » ?
Quand j’ai vu la manière dont elle était traitée immédiatement après son déclenchement, j’ai été choquée par
l’emballement médiatique qui, parfois jusqu’à la diffamation, faisaient de mes connaissances des terroristes et de
mauvaises caricatures de révolutionnaires. J’ai tout de suite pensé que j’étais au bon endroit, à la bonne distance
pour raconter de l’intérieur ce qu’ils vivaient et qui n’avait à peu près rien de commun avec ce qui était exhibé. J’ai
compris qu’un des principaux champs de bataille de cette histoire concernait les mots. Les mots qui les accusent, «
groupe à vocation terroriste, association de malfaiteurs, sabotage, manifestations violentes… » il y avait également
les mots qu’ils sont accusés d’avoir écrits (L’insurrection qui vient, signé du comité invisible, éd. La Fabrique), les
mots avec lesquels ils et elles vont être capables de reformuler la situation, de se défendre et aussi les mots qu’ils ne
disent pas.
En quoi étiez-vous « au bon endroit » et à la « bonne distance » ? Dans le film, vous mentionnez votre lien
personnel avec Manon, qui est donc la sœur de votre compagnon, mais c’est la seule information concernant
votre relation avec l’ensemble de l’affaire et ses protagonistes.
Le bon endroit vient de mon lien avec Manon. Nous nous faisons confiance l’une l’autre et je dirai que c’est sur cette
confiance que le film repose. J’ai cherché le bon endroit compte tenu de la gravité de ce qu’ils traversaient. Certains
des inculpés risquaient jusqu’à 10 ans de prison. Eux et leur entourage ont été suivis, mis sur écoute par la police
pendant de nombreuses années. Je ne voulais pas que ma caméra puisse être ressentie comme intrusive, indiscrète
ou qu’elle apporte une quelconque gêne dans ce moment délicat qu’était la préparation au procès. J’avais par ailleurs
décidé d’emblée d’écarter du film la question de leur culpabilité – question qui occupait la police, la justice et les
médias – et c’est la raison pour laquelle j’ai voulu formuler le verdict dans le titre du film.
Prix du long-métrage Corsica.Doc/Via Stella
RELAXE de Audrey Ginestet : un film qui opère comme une machine de précision en
démontant tout un système de pouvoir.
Déconstruction d’une fiction admirablement mise en scène !
21h15 TOUTE LA BEAUTÉ ET LE SANG VERSÉ (Pyramide ! Sortie : 15/03/2023)
de Laura Poitras/Etats-Unis, 1h57 – VOST
Lion d’or Festival de Venise 2022 !
Nan Goldin a révolutionné l’art de la photographie et réinventé la notion du genre et les définitions de la normalité.
Immense artiste, Nan Goldin est aussi une activiste infatigable, qui, depuis des années, se bat contre la famille
Sackler, principaux actionnaires d’une multinationale pharmaceutique, responsable de la crise des opiacés aux États-
Unis et dans le monde. Toute la beauté et le sang versé nous mène au cœur de ses combats artistiques et politiques,
mus par l’amitié, l’humanisme et l’émotion…
ENTRETIEN AVEC LAURA POITRAS (TELERAMA : TTT-Extrait)
Quelles relations entreteniez-vous avec Nan Goldin avant de la filmer ?
Sans la connaître personnellement, j’admirais son travail depuis longtemps. Elle fait partie des artistes que j’ai
découverts pendant mes études de cinéma au San Francisco Art Institute, et je la considérais comme une icône
radicale, dont le rapport à l’intimité, à la mise en scène, à la narration a toujours été une source d’inspiration.
Nous nous sommes croisées une première fois lors d’un festival, puis avons réellement été présentées après
qu’elle a créé, en 2017, l’association Pain (Prescription Addiction Intervention Now). À l’époque, les membres de
l’organisation filmaient déjà leurs actions militantes, en introduisant des caméras cachées dans les musées. Je
trouvais ces initiatives importantes, courageuses, et j’ai demandé à Nan si je pouvais l’aider, participer d’une
manière ou d’une autre. Le documentaire est né comme cela.
Quelles relations entreteniez-vous avec Nan Goldin avant de la filmer ?
Sans la connaître personnellement, j’admirais son travail depuis longtemps. Elle fait partie des artistes que j’ai
découverts pendant mes études de cinéma au San Francisco Art Institute, et je la considérais comme une icône
radicale, dont le rapport à l’intimité, à la mise en scène, à la narration a toujours été une source d’inspiration. Nous
nous sommes croisées une première fois lors d’un festival, puis avons réellement été présentées après qu’elle a
créé, en 2017, l’association Pain (Prescription Addiction Intervention Now). À l’époque, les membres de
l’organisation filmaient déjà leurs actions militantes, en introduisant des caméras cachées dans les musées. Je
trouvais ces initiatives importantes, courageuses, et j’ai demandé à Nan si je pouvais l’aider, participer d’une
manière ou d’une autre. Le documentaire est né comme cela.
Au-delà de son combat, votre film est un portrait très personnel de Nan Goldin. Pourquoi avez-vous choisi
d’entrer à ce point dans son histoire ?
L’activisme de Nan était au cœur du projet, mais les entretiens que j’ai menés avec elle ont changé la portée du
film. Sa parole était si forte, brute, émotionnelle que raconter son parcours est devenu une évidence. Par ailleurs,
en m’autorisant à utiliser ses archives photo — dans lesquelles elle a documenté toute sa vie —, Nan m’a permis
de remonter le temps, de revenir sur sa jeunesse, sa famille, le suicide de sa sœur, son parcours dans le New York
underground, d’une manière extrêmement intime, comme en principe seule une fiction pourrait le faire.